Etonnante nature humaine toujours à chercher à semer brindille, miette et petit caillou sur son passage. Petit Poucet perdu, loin de son infini.
Je veux faire et bâtir, ne pas lâcher la truelle, assembler des pierres en angles ronds et vifs, érafler mes mains aux bois à polir, tracer des obliques sur la terre, des alphabets personnels et des
calligraphies uniques. raboter mon regard aux écorces des arbres, juste pour éviter l'inaperçu.
Dans les années qui filent, j'oeuvre sur le métier de la vie et je m'applique cent fois, mille fois, je travaille et j'éloigne le rien sans m'en rendre seulement compte, alors que je ne rêve que de tendre vers lui.Tendre vers ce rien, ce vide qui est Tout.
Trois lettres à contre sens qui ont réussi à signifier le contraire de ce que le mot latin signifie, ce « res » latin rempli à ras bords qui étouffe et bouche les espaces
Pied de nez du vocabulaire à la sémiologie.. `
Vivre comme si j'ignorais que tout à l'heure, demain plus tard, pas loin dans l'espace sidéral , j'allais quitter mon corps et partir, comme si la mort n'existait pas.
Et j'oublie et je m'enfume dans les brouillards de la réalité.Je travaille un petit arpent de moi, le contremine savamment, le tourne et retourne, y fais des semis, jardinière consciencieuse d 'un territoire que je fais mien, comme si le bail en était éternel, comme si je voulais laisser une trace de qui je suis ici... pour qu'on dise après moi, voilà ce qu'elle a fait ou créé ou écrit ou construit.
Grandeur et dérision douloureuse de ce besoin de reconnaissance quand il n'est d'important que d'aimer, sans laisser de tangible, de visible, de palpable, juste ce feu brûlant qui fragmente les étoiles, habite les beautés intérieures et largue ses lumières dans les lunes bien pleines
Qui taille les mots pour traverser les partitions, exploser les musiques, ébranler les certitudes et anéantir les doutes.
1 mars 2019 Marie Odella